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Réduire la fracture numérique : le rôle-clé de la médiation
Depuis 1998, les pouvoirs publics ont élaboré plusieurs programmes ou plans dans l’objectif de développer l’administration électronique. Le dernier en date : le « programme Action publique 2022 », lancé par le Gouvernement en octobre 2017, reprend pour priorité la transformation numérique des administrations. Objectif : dématérialiser les 250 démarches administratives les plus utilisées par les Français d’ici mai 2022. Néanmoins le numérique fait apparaître de nouvelles inégalités, entre ceux qui disposent et maîtrisent cette technologie et ceux qui en sont exclus. Qui sont les personnes victimes d’illectronisme ? Combien sont-elles ? Quels sont les moyens et services mis en place pour lutter contre la fracture numérique, sur le plan national et en Normandie ? Eclairage dans cet article, qui propose également un entretien avec une conseillère numérique de France services.
Version imprimable du zoom
(paru dans le Mag emploi formation n°14 d'avril 2022)
Le sommaire :
- 17 % des Français en situation d'illectronisme
- La stratégie nationale pour un numérique inclusif
- Trois réseaux dédiés à la médiation numérique en Normandie
- Entretien avec Elyse Olivier, conseillère numérique France services
17 % des Français en situation d'illectronisme
Selon l’Insee*, neuf français sur dix disposent d’un appareil permettant de se connecter à Internet. Pourtant, 17 % d’individus peinent encore à s’en servir. On dit d’eux qu’ils sont victimes d’illectronisme, contraction d’illettrisme et d’électronique, terme utilisé pour désigner la difficulté à utiliser Internet dans la vie de tous les jours et de façon autonome.
A l’heure où l’utilisation des services en ligne fait partie des gestes courants de la vie quotidienne, plusieurs rapports, publiés récemment, ont souligné cette non-maîtrise des usages numériques par les personnes, une compétence qui figure parmi les compétences de base, à côté des compétences comme lire, écrire et compter.
Dans un rapport du Sénat (septembre 2020)*, il est indiqué que quatorze millions de Français ne maîtrisent pas le numérique et que près d’un Français sur deux n’est pas à l’aise avec le numérique. Plus récemment, le baromètre du numérique 2021 du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Crédoc)* montre qu’il existe des freins persistants à la pleine utilisation du numérique, malgré la démultiplication de ses usages durant la crise sanitaire. Enfin, dans son dernier rapport d‘activité publié en mars 2021*, la Défenseure des droits considère que si la numérisation facilite les démarches pour certains, elle est devenue un obstacle à l’accès aux droits pour d’autres.
Toutes les catégories de population sont touchées par l’illectronisme, avec toutefois une prévalence de seniors qui représentent 44 % des personnes victimes d’illectronisme. La jeune génération n’est pas épargnée bien qu’elle ait grandi avec la révolution des écrans. Elle peut, en effet, rencontrer certaines difficultés dans la compréhension d’un vocabulaire administratif technique. Les personnes en grande précarité, étrangères ou réfugiées se trouvent également très souvent en situation d’illectronisme.
Les écrans sont partout, exigent qu’on lise, qu’on écrive, ne serait-ce que quelques mots. Mais ils ne sont pas à la portée de tous, notamment de ceux qui souffrent d’illettrisme. Pour les 2 500 000 personnes qui ne maîtrisent pas la lecture, l’écriture, le calcul, chaque écran est une barrière qui isole progressivement.
Lutter contre l’illectronisme, c’est aussi s’engager pour que chacun maîtrise pleinement et solidement la lecture, l’écriture, le calcul. Le recours au numérique offre par ailleurs de grandes opportunités pour accélérer le recul de l’illettrisme. Il est en effet possible de faire du numérique un allié, un levier puissant qui crée de la motivation pour réapprendre à tout âge.
* Retrouvez les références citées dans cette partie en téléchargement dans notre rubrique « Liens utiles », en bas de cette page.
La stratégie nationale pour un numérique inclusif
Pour accompagner les Français dans leurs usages numériques, les gouvernements successifs ont pris diverses mesures. La dernière en date, la stratégie nationale pour un numérique inclusif, vise à ce que chacun puisse être formé ou accompagné dans ses usages numériques. L’objectif étant de détecter les publics les plus éloignés du numérique et de les rendre autonomes.
Avec le plan « France Relance », 250 millions d'euros sont consacrés à l'inclusion numérique, pour le financement de trois mesures principales :
• La formation et le financement de l’activité de 4 000 conseillers numériques France service (voir plus loin) pour déployer des ateliers et des formations numériques, afin de répondre au manque de médiateurs numériques dans les territoires. Ces conseillers sont progressivement déployés dans des structures publiques (mairies, centres sociaux, maisons France Services, médiathèques…) ou privées (entreprises de l’économie sociale et solidaire, associations…)
-> 200 millions d’euros
• La conception et le déploiement de kits d’inclusion numérique pour toutes les structures de proximité (mairies, bibliothèques, centres sociaux, tiers lieux, associations caritatives)
-> 40 millions d’euros
• La généralisation du service public numérique « Aidants connect » et la montée en compétences numériques des aidants professionnels, en première ligne de l’inclusion numérique, qui réalisent des démarches administratives à la place d’un usager et ce, de façon sécurisée.
-> 10 millions d’euros
Trois réseaux dédiés à la médiation numérique en Normandie
Selon la coopérative numérique (MedNum), ce terme désigne « la mise en capacité de comprendre et de maîtriser les technologies numériques, leurs enjeux et leurs usages, c’est-à-dire développer la culture numérique de tous, pour pouvoir agir dans la société numérique ». Il s’agit de sensibiliser et de former les Français à ces nouveaux usages. La médiation numérique consiste ainsi en un accompagnement qualifié et de proximité des individus et des groupes (habitants, associations, entreprises, élèves, étudiants, parents, professionnels…), dans une logique d’éducation populaire et de formation tout au long de la vie.
Les Espaces France services, en cours de déploiement sur le territoire normand
Ils ont pour objectifs de permettre à chaque citoyen, quel que soit l'endroit où il vit, d'accéder aux services publics et d'être accueilli dans un lieu unique, par des personnes formées et disponibles, pour effectuer ses démarches du quotidien en lien avec des partenaires nationaux et locaux.
Chaque usager est accompagné en fonction de son niveau d'autonomie numérique et administrative. Il peut aussi être orienté vers des formations pour gagner en autonomie, financées grâce au Pass numérique, remis gratuitement au bénéficiaire. Au-delà des formalités administratives, les usagers ont également accès à des postes informatiques en libre-service.
Il existe 2 055 espaces labellisés France services en janvier 2022, repérables via une cartographie. Plus de 150 sont présents en Normandie, répartis sur les cinq départements :
Ces espaces, labellisés par l'Agence nationale de la cohésion des territoires, accueillent le public dans des lieux fixes mais quelques-uns ont une forme itinérante pour aller au plus près des usagers. Cinq bus sillonnent ainsi différents territoires normands :
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- Bus 56 (Évreux)
- Bus France services Espace numérique 27 (Pont-Audemer)
- Bus France services Pimms Médiation Seine-Eure (Val-de-Reuil)
- Bus France services de Coutances Mer et Bocage (Manche)
- Bus France services Gouffern en Auge (Orne).
La fiche « Espaces France services » sur le site Mesures et Dispositifs
Une région bien connectée avec 152 espaces publics numériques (EPN)
Labellisés par la Région Normandie, les EPN visent à accélérer la diffusion de la culture numérique en Normandie, encourager l'innovation et favoriser l'accès et l'accompagnement aux usages numériques. Ce sont des lieux ouverts à tout public, dotés d’un équipement informatique complet et animés par médiateur numérique qualifié qui accompagne les usagers dans l’utilisation du numérique (initiation à internet, photos, vidéos, tablettes, impression 3D ...). On peut aussi y venir avec son propre matériel simplement pour bénéficier de la connexion internet.
La fiche « Espaces publics numériques » sur le site Mesures et Dispositifs
Le Calvados, précurseur de la médiation numérique avec les Points info 14
Le Département du Calvados a mis en place, dès l’année 2000, les Points info 14 pour notamment aider les Calvadosiens dans leurs démarches en ligne. La politique nationale rejoignant cette initiative avec la mise en place du programme France services, les 43 Points info 14 sont progressivement labellisés Espaces France services.
Le Département, toujours dans cette volonté d’améliorer l’accès des Calvadosiens au numérique, a répondu à l’appel à manifestation d’intérêt « conseillers numériques », lancé par l’État fin 2020 et vient de mettre en place un réseau départemental d’inclusion numérique : « Numérique ensemble ». Ainsi, depuis septembre 2021, 23 conseillers numériques (voir notre entretien avec Elyse Olivier ci-dessous) initient gratuitement les personnes qui le souhaitent au numérique et à ses usages, en rendez-vous individuels ou dans le cadre d’ateliers au sein des Points info 14, des médiathèques, des circonscriptions d’action sociale ou encore des Espaces publics numériques.
Entretien avec Elyse Olivier, conseillère numérique France services
Le rôle du conseiller numérique est d'accompagner les usagers en difficulté pour utiliser Internet dans leurs activités quotidiennes. Il propose des ateliers d’initiation au numérique ouverts à tous, des accompagnements individualisés et des permanences dans des lieux proches de la population. Le conseiller numérique travaille pour le compte de collectivités, d’associations ou d’entreprises sociales et solidaires. Et, en fonction de son employeur, il peut être amené à se spécialiser sur un type d’accompagnement ou au contraire à être polyvalent...Une posture souvent partagée entre celle de formateur et de travailleur social !
Le Mag a rencontré Elyse Olivier, conseillère numérique France Services, agent du Département du Calvados, sur le territoire du Bessin. Nous lui avons posé quelques questions…
Depuis quand occupez-vous ce poste de conseillère numérique ?
Elyse Olivier (EO) : Je suis employée par le Département du Calvados depuis septembre 2021 au sein d’un réseau de 23 conseillers numériques répartis par secteur dans tout le département. Nous sommes trois conseillers numériques sur le secteur du Bessin - qui va à peu près d’Isigny-sur-Mer à Creully sur Seulles – et nous nous partageons le territoire de sorte à assurer une vraie continuité de services pour répondre au mieux aux attentes des usagers et des partenaires. Sur le secteur, nous sommes donc présents dans la majorité des Points Infos 14 (Isigny-sur-Mer, Le Molay-Littry, Trévières, Sainte-Marguerite-d’Elle, Port-en-Bessin, Creully sur Seulles, Tilly sur Seulles). Nous travaillons également avec le centre communal d’action sociale (CCAS) de Bayeux pour mettre en place des actions dans les espaces Saint-Jean et Argouges et au sein des locaux du CCAS. Enfin, nous organisons des journées ouvertes à la circonscription d’action sociale de Bayeux. Objectifs : être à proximité du public et le plus utile possible.
Quelles sont vos missions ?
EO : Nos missions sont larges. Principalement, nous faisons de l’initiation et de la sensibilisation aux outils du numérique. Nous partons du B-A-BA : allumer un ordinateur, un smartphone ou une tablette, utiliser un clavier, une souris, naviguer sur internet, installer des applications / des logiciels, gérer ses dossiers et ses fichiers, etc. de façon à ce que l’usager devienne autonome. Nous avons aussi la mission de la sensibilisation, la protection des données, la sécurisation des mots de passe, des achats... Nos missions sont adaptées au public que nous rencontrons. Par exemple, nous pouvons intervenir au sein des collèges, pour des ateliers autour de l’utilisation des espaces numériques de travail (ENT), du cyber harcèlement, du temps passé sur les écrans, etc. Nous apportons aussi une solution en cas de blocage particulier, la connexion sur la boîte mail ou la lecture d’un QR code... Tous les conseillers numériques ont des parcours différents, nous avons suivi une formation sur les compétences sociales et numériques lors de notre prise de poste.
Quel type de public fait appel à vos services ?
EO : Notre public est principalement composé de seniors. Mais le service est ouvert à tous et nous sommes prêts à intervenir pour répondre aux demandes de chacun, en élargissant les horaires ou en développant notre présence à d’autres structures par exemple.
Concrètement, comment cela se passe ? Quelles demandes vous adresse-t-on ?
EO : Lorsque nous rencontrons une nouvelle personne, nous nous renseignons sur ses besoins, ses attentes et surtout son usage du matériel numérique. Nous avons des demandes diverses : utilisation du clavier, de la souris, gestion des mails etc. Nous avons aussi des demandes plus poussées, pour des initiations sur du traitement de texte, sur les tableurs, les sites internet ou autre. Nous nous centrons beaucoup sur le quotidien des personnes. Par exemple, si un usager nous parle de sa passion pour le jardinage, nous allons l’aiguiller en lui montrant des choses en lien avec son hobby. Notre but est aussi de montrer au public que le numérique n’est pas que pratique, mais il est aussi ludique.
Rencontrez-vous des difficultés dans votre mission ?
EO : Pas particulièrement. Les usagers comprennent assez facilement l’intérêt du service que nous leur proposons et ils nous font confiance. Nous avons un peu plus de mal à communiquer sur notre présence, mais cela se fait petit à petit.
Qu’appréciez-vous le plus dans vos fonctions ?
EO : J’apprécie énormément le contact avec le public. Il y a des usagers qui nous font entièrement confiance, et c’est tellement gratifiant de les voir devenir autonome petit à petit. Pour certains, un blocage sur leur smartphone est une catastrophe, et j’apprécie beaucoup le fait de pouvoir être là pour les aider.
Des évolutions prochaines, des projets ?
EO : Aujourd’hui, nous élargissons notre champ d’action : au début de notre activité, nous étions presque exclusivement sur un système de permanence sur rendez-vous. Désormais, nous organisons de l’accueil sans rendez-vous, au CCAS ou à la circonscription d’action sociale de Bayeux par exemple. Nous sommes aussi en train de travailler sur la mise en place d’ateliers collectifs. Nous essayons de répondre au mieux aux besoins des personnes en nous adaptant aux demandes et aux périodes de l’année, notamment pour les publics scolaires.
Sylvie Laillier (Carif-Oref de Normandie)
Aïcha Talbi (Carif-Oref de Normandie)
Liens utiles
- Une personne sur six n'utilise pas Internet, plus d'un usager sur trois manque de compétences numériques de base (Insee Première n°1780, octobre 2019)
- Rapport d'information au nom de la mission d'information sur la lutte contre l'illectronisme et pour l'inclusion numérique (Sénat, septembre 2020)
- Baromètre du numérique 2021 (Credoc, juillet 2021)
- Le Défenseur des droits : rapport annuel d'activité 2020 (mars 2021)