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Transitions Pro, nouvel acteur des parcours professionnels en Normandie
Depuis le 1er janvier 2020, les associations Transitions Pro ont remplacé les Fongecif. Portées par la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, ces commissions paritaires interprofessionnelles régionales (CPIR) sont chargées notamment de l’examen et de la prise en charge des projets de transition professionnelle des salariés. Nous nous sommes entretenus avec Jean-Paul Choulant, président de Transitions Pro Normandie, Laurent Laouénan, son directeur, ainsi que Béatrice Wala, chargée de communication, pour évoquer les missions, l’organisation, la crise Covid-19, les projets de Transitions Pro Normandie, désormais la dernière structure paritaire interprofessionnelle régionale en Normandie.
1/ Messieurs Choulant et Laouénan, pouvez-vous nous dire ce qu’est Transitions Pro : son origine, son fonctionnement, ses principales missions ?
Jean-Paul Choulant (JPC) : Transitions Pro est une commission paritaire interprofessionnelle régionale, née à la suite de la réforme de la formation professionnelle traduite par la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel du 5 septembre 2018. Il y a une Transitions Pro par région, avec une tête de réseau Certif Pro, interlocuteur du ministère, de la DGEFP et de France Compétences sur les sujets relatifs à la formation. Les Transitions Pro sont agréées par l’Etat et ont récupéré une partie des compétences des anciens Fongecif et des anciens Coparef, dont celles relatives aux certifications CléA par exemple. Plus précisément, les Transitions Pro prennent en charge les dossiers de projets de transition professionnelle (PTP) des salariés. Depuis novembre 2019, elles donnent aussi un avis sur les projets des démissionnaires (voir question 6). Si l’avis est favorable, la personne peut prétendre à une indemnisation par Pôle emploi. La troisième grande mission concerne la délivrance des certifications CléA. On a « délégation » de Certif Pro qui porte la certification CléA, pour à la fois la remise et la promotion de CléA sur le territoire normand. Transitions Pro porte aussi une mission d’analyse et d’observation…
Laurent Laouénan (LL) : Au titre de l’analyse et de l’observation, nous pouvons mentionner la mission de suivi du conseil en évolution professionnelle (CEP). Les Transitions Pro n’ont plus la mission d’opérateur de CEP, qui était portée par les Fongecif, mais elles ont la mission d’assurer le suivi de la mise en œuvre et d’en faire un rapport annuel à France Compétences après présentation en Crefop. Nous aurons aussi vocation à observer et à analyser la VAE en région. Sur le champ de la VAE, nous avons une particularité puisque nous sommes la seule région de France à avoir encore un marché « région » sur les points relais conseils (PRC). Nos conseillers VAE interviennent aussi bien auprès des demandeurs d’emploi que des salariés. Et nous participons au groupe de travail national qu’animera Certif Pro sur le suivi de la VAE et notamment le développement de la VAE hybride. Sur ce registre, nous travaillons, en partenariat avec le Rectorat (Dava), sur la mise en place et le repérage de contenus de formation qui pourront être déclinés en blocs de compétences.
2/ Comment êtes-vous organisé pour déployer ces missions sur l’ensemble du territoire normand ?
LL : Nous avons un siège social situé à Hérouville-Saint-Clair et une deuxième implantation importante à Bois-Guillaume sur les hauteurs de Rouen. Une dizaine de salariés travaille sur chacun de ces deux sites. Il y a également deux permanences, au Havre et à Evreux, avec un binôme, conseiller VAE référent de parcours. Transitions Pro assure également une douzaine d’autres permanences sur le territoire (Lillebonne, Bernay, Fécamp, Pont-Audemer…) pour recevoir les publics. La vraie plus-value est ce maillage territorial, cette proximité de service. L’effectif total est de 26 salariés, dont quatre conseillers VAE (CDI de chantier) et huit référents de parcours.
JPC : Les commissions d’instruction se réunissent régulièrement, une fois par mois, davantage en période estivale pour les rentrées de septembre. Les référents de parcours montent les dossiers qui sont présentés en commission par la responsable d’instruction pour étude. Ce sont des commissions paritaires, comprenant cinq représentants de salariés, cinq d’employeurs. Les personnes reçoivent une notification leur indiquant si le dossier est accepté ou pas. Les personnes pour lesquelles le dossier est refusé peuvent, si elles apportent des éléments nouveaux, faire un recours. C’est une autre commission qui statue alors sur le dossier. C’est le même processus pour les démissionnaires, sauf que le dossier est transmis par les conseillers en évolution professionnelle. Transitions Pro donne son avis sur le caractère réel et sérieux du projet. Il existe, enfin, une troisième commission, le jury CléA, qui se réunit toutes les quatre à six semaines. Le jury composé des partenaires sociaux décide ou pas de valider la demande de certification CléA présentée par les organismes évaluateurs. Les dossiers sont déposés par les organismes sur la plateforme CléA, gérée par Certif Pro au niveau national. Une autre commission va se mettre en place autour de l’analyse et de l’observation (une première réunion d’installation s’est tenue le 26 mai), avec la volonté pour les partenaires sociaux d’apporter leur propre analyse et de l’exprimer, dans un certain nombre d’instances régionales (Crefop…) traitant de l’emploi et de la formation en région.
LL : Concernant les financements, nous avons - 50 % de budget par rapport à 2019. Nous sommes passés, à peu près, de 40 millions à 20 millions, en termes de capacité d’abondements financiers sur les dossiers PTP. Cependant, en Normandie, nous bénéficions d’un soutien sans faille de la Direccte Normandie qui va permettre aux Normands de bénéficier des programmes opérationnels pré-existants dans les deux programmes engagés depuis 2014 sur un fléchage de FSE, soit environ 8,5 millions d’euros en 2020 et 2021. Donc nous aurons un budget complémentaire par rapport aux autres Transitions Pro. Sur le principe, cela va conduire à des taux d’acceptation très honorables. Et pour maintenir un nombre important de bénéficiaires, l’enjeu stratégique sera de diminuer les coûts de formation en réduisant les durées, analyser des continuités de parcours, faire appel à la VAE, à CléA… enfin essayer de morceler un petit peu plus les parcours. Les critères d’éligibilité étant plus resserrés, de toute façon, il va falloir travailler autrement dans l’instruction financière. Il faut réduire les parcours pour maintenir un nombre élevé de bénéficiaires.
JPC : Nous avons aussi des partenariats, notamment avec l’Agefiph pour financer le parcours des personnes reconnues « travailleur handicapé » (RQTH). Pour les formations sanitaires et sociales, une convention existe avec la Région qui prend en charge le coût pédagogique de ces formations, Transitions Pro prenant en charge les rémunérations et frais annexes. Enfin, il y a une convention spécifique pour le secteur de la pêche.
LL : Avec la Région, nous avons d’autres partenariats à développer, par exemple sur les publics salariés précaires (intermittents, intérimaires) et les parcours de formation à la pêche également, en partenariat avec Ocapiat. Au-delà de 18 parcours pris en charge sur les coûts pédagogiques, c’est la Région qui les assume. Cela permet de former davantage de marins-pêcheurs qui veulent s’installer en Normandie que dans d’autres régions. C’est un partenariat assez original. Il existe également des pistes de partenariat avec les Opco, notamment pour des parcours de formation pluriannuels. Par exemple, pour un parcours infirmier, Transitions Pro pourrait prendre en charge la première année les rémunérations et l’Opco Santé garantir la fin du parcours avec une formation en alternance, avec une promesse d’embauche, la Région prenant en charge les coûts pédagogiques…
3 / Quelles sont les démarches à accomplir par un salarié souhaitant se reconvertir ?
Béatrice Wala (BW) : Les salariés, peuvent se renseigner en premier lieu sur le site internet https://www.transitionspro-normandie.fr. Ils peuvent prendre un rendez-vous via un espace sécurisé ou nous appeler directement. Un numéro unique est proposé : le 02 31 46 26 46. Le dossier est accessible sur le site, ils peuvent bénéficier d’un accompagnement pour le remplir s’ils le souhaitent en prenant un rendez-vous avec un référent, qui peut se réaliser par visio. Il est demandé que les dossiers soient déposés trois mois avant le début de la formation. Si le dossier est refusé, la personne peut ainsi avoir la possibilité de faire un recours. Le salarié doit faire une demande à l’employeur quatre mois avant le début de la formation pour des formations de plus de six mois, et deux mois avant pour des formations inférieures à six mois. Ce sont les délais légaux. Pour les CDD, les dossiers doivent être déposés en cours d’exécution du contrat.
LL : A noter que pour être éligible au PTP, le salarié doit porter un projet visant soit un changement de métier, soit un changement de convention collective, soit un changement de code Naf.
4/ En Normandie, combien de dossiers PTP ont-ils été examinés depuis la mise en place de Transitions Pro ? La crise sanitaire a-t-elle des effets sur les projets de reconversion que vous recevez ?
LL : Il y a une commission d’instruction tous les mois, avec entre 60 et 80 dossiers à étudier. Pour les démissionnaires, il y en a une trentaine par mois. Donc nous examinons, en général, entre 70 et 90 dossiers par mois. Néanmoins, il y a une saisonnalité. Davantage de demandes sur la période mai / juin / juillet pour des entrées en formation en septembre. Le taux d’acceptation était en début d’année autour de 50 à 55 %. Quand nous avons su que nous aurions le soutien des fonds européens, nous avons intégré des budgets complémentaires, et pour les deux dernières commissions, le taux est passé à 75 % d’acceptation, largement au-dessus de la moyenne nationale aux alentours de 50 %.
BW : Au 10 juin, nous comptabilisons 498 dossiers déposés (PTP CDI et CDD) et 352 acceptés. Suite à la crise sanitaire, il risque d’avoir un peu plus de dossiers sur les prochaines commissions. Néanmoins, le rythme ne devrait pas être aussi soutenu que l’année dernière.
LL : Cette crise est une source d’anxiété pour les référents de parcours. En effet, ils ne savent pas trop s’ils vont être en capacité de gérer les flux qui pourraient être importants au regard du temps dont ont pu disposer les personnes pour se remettre en question. Ça on ne le mesure pas et personne ne va pouvoir le mesurer ces prochaines semaines. Y aura-t-il plus de démarches, autant, moins ? Nous ne savons pas comment tout cela va se traduire concrètement dans les semaines et mois à venir. Concernant les chiffres, en 2019, 1 000 dossiers ont été acceptés sur la base de 21 millions de budget. Il y en aura certainement moins cette année.
5/ Avez-vous modifié votre fonctionnement depuis le début de la crise sanitaire ? Les dossiers sont-ils traités de façon dématérialisée ? Quels moyens avez-vous mis en œuvre pour répondre aux demandes de formation des salariés ?
LL : L’expérience du confinement nous a permis de mettre en place la dématérialisation à partir du 6 avril. Des rendez-vous sont possibles avec les référents de parcours ou les conseillers VAE par téléphone ou par visio.
BW : Quinze jours après le début du confinement, tout était opérationnel. Cela a permis de poursuivre notre service. Les personnes peuvent aussi prendre leur rendez-vous et saisir leur dossier en ligne directement via leur espace sécurisé. Chaque étape du dossier est validée par Transitions Pro. Des points intermédiaires sont effectués avec les personnes si besoin. Tout se fait automatiquement, les retours sont bons, le système est fluide.
LL : La mise en œuvre de la VAE classique sera également dématérialisée. Les bénéficiaires pourront engager également une démarche de VAE à distance, en déposant leur dossier et en ayant un accompagnement de Transitions Pro Normandie pour constituer leur dossier de demande de financement.
6 / Depuis le 1er novembre 2019, il est possible pour un salarié du secteur privé en CDI de démissionner et de bénéficier de l’allocation chômage pour réaliser un projet de reconversion professionnelle. La CPIR doit attester du caractère « réél et sérieux » du projet. Les salariés s’emparent-ils de cette possibilité de reconversion en Normandie ?
LL : Environ une trentaine de dossiers sont examinés par mois pour les démissionnaires. Un avis est donné, dans 95 % des cas favorable, engageant Pôle emploi sur les prises en charge.
JPC : Trois quarts des projets de formation visent une création d’entreprise. Pour préciser les propos de Laurent, on préconise toutefois, avant que la personne ne donne sa démission, que son projet puisse être financé par Pôle emploi ou la Région. C’est important pour nous que l’on sécurise bien le parcours de la personne.
BW : Le dispositif est lancé. Les personnes étaient en attente de la parution du décret. C’est monté en flèche. Les dossiers « démissionnaires » sont également dématérialisés. La passerelle se fait avec le CEP.
7 / Qu’avez-vous comme projet ces prochains mois ? Des partenariats se mettent-ils en place ? Quelles collaborations peuvent être envisagées entre Transitions Pro et le Carif-Oref ? Et avec les Opco ?
JPC : On a une volonté d’aller sur les projets, les Transitions Pro sont attendues pour être force de proposition de toute façon. Il y a plusieurs projets qui évoluent beaucoup avec le contexte actuel. Actuellement, l’Etat a relancé le FNE-Formation pour permettre aux salariés en activité partielle de se former (ces formations ne coûtent rien à l’entreprise). La Direccte a conventionné avec les Opco en région. On sort du confinement mais l’activité partielle va encore durer quelques mois, on pourrait peut-être compléter le FNE-Formation. Sur la VAE, il y a une expérimentation qui dure jusqu’à la fin de l’année pour que l’on finance directement des VAE mais aussi pour que l’on puisse développer la VAE hybride. Concernant CléA, il y a un enjeu pour permettre aux bénéficiaires d’aller plus loin dans la démarche. CléA c’est une étape dans un parcours et pas une fin en soi. Un projet d’enquête auprès des bénéficiaires de CléA impliquant le Carif-Oref et son centre ressources illettrisme (CRI) est en cours.
LL : Des réflexions sont en cours avec l’Opco Santé sur des parcours longs. Avec également l’Opco 2I sur des formations d’ingénieurs pour lesquelles Transitions Pro pourrait prendre en charge la première année d’un CQP. Sans doute y aura-t-il également des partenariats avec les opérateurs du CEP pour communiquer et relayer nos offres de service. Intervenir aussi autant que de besoin en expertise puisqu’on a la chance en Normandie d’avoir conservé nos conseillers. Nous allons aussi nous rapprocher de Transitions Pro Pays-de-la-Loire, avec qui nous partageons le même opérateur sur le CEP, Catalys. Une coopération Grand Ouest pourrait naître comme c’était le cas à l’époque des Fongecif. Enfin, une convention de partenariat est envisagée avec le Carif-Oref. Nous avons repéré plusieurs champs de coopération potentiels : champ de l’observation (partage d’indicateurs, mise en relation avec d’anciens bénéficiaires du PTP pour recueillir des témoignages pour une étude plus qualitative…), appui technique (coproduction de vidéos, des webinaires pour présenter le PTP, le dispositif « démissionnaires »…).
Propos recueillis par Guillaume Folléa et Valérie Leroy
(Carif-Oref de Normandie)